Le contrat d’entreprise est régi par le Code civil (article 1779 du Code civil). Il s’agit du contrat par lequel une personne (entrepreneur) s’engage envers une autre (le maitre de l’ouvrage), à exécuter contre une rémunération, un travail indépendant, sans représenter le maitre de l’ouvrage.
Le contrat d’entreprise est classé parmi les contrat de louage d’ouvrage. Il doit être cependant distinguer du contrat de travail, dans lequel existe un lien de subordination. Pour que le contrat d’entreprise ne soit pas requalifié en contrat de travail, l’entreprise doit conserver le choix des moyens, que sa rémunération ne soit pas forfaitaire et qu’elle puisse avoir d’autres clients. Il faut également que le client n’ait pas de pouvoir dans l’organisation de l’entreprise.
Le contrat d’entreprise est un contrat spécial, aussi bien au niveau de sa formation, qu’au niveau des obligations qu’il met à la charge des parties.
1. La formation du contrat d’entreprise
Il est d’usage que la conclusion du contrat d’entreprise soit précédée de l’établissement d’un devis par l’entreprise, mais le contrat d’entreprise peut se former même si un tel devis n’a pas été demandé.
Pour être valable, le contrat d’entreprise n’a pas besoin d’être écrit, il peut être simplement oral. Cependant, la sécurité réclame souvent qu’un écrit soit établi car cela permet aux parties de savoir quelles sont leurs obligations respectives.
De même, un accord sur le prix n’est pas une condition de validité du contrat d’entreprise contrairement au contrat de vente de droit commun.
Lorsque le contrat d’entreprise est écrit, il va contenir plusieurs documents. Un premier document comprend les clauses administratives générales, par exemple, la clause pénale à la charge de l’entrepreneur en cas de retard dans les travaux. Le deuxième document concerne les clauses techniques générales. Et enfin, le troisième document est un acte d’engagement qui va sceller l’accord ainsi défini.
2. Les obligations des parties
a. Les obligations de l’entrepreneur
L’entrepreneur doit tout d’abord exécuter le travail commandé et uniquement ce qui a été commandé, conformément aux règles de l’art (règles non écrites communément admises dans les différents corps de métier de la construction).
En fonction du degré de détail de la commande, il doit utiliser les matériaux commander par le maître de l’ouvrage.
Au cours de son travail, l’entrepreneur a une obligation permanente de conseil à l’égard du maître de l’ouvrage, des autres entrepreneurs et de l’architecte. Cette obligation tacite n’a nullement besoin d’être expressément rappelée dans un contrat ou dans un devis pour déployer toutes ses conséquences juridiques.
Ce souci d’information requiert une démarche active. Il ne s’agit pas seulement de répondre aux questions que pose le maître de l’ouvrage, qui est considéré comme un non-professionnel, mais d’anticiper son ignorance en attirant son attention sur tel ou tel problème qui ne lui viendrait pas immédiatement à l’esprit.
Ainsi, l’entrepreneur doit mettre en garde le maitre de l’ouvrage contre certaines techniques.
L’obligation de conseil étant une obligation de moyens, la charge de la preuve pèse sur le maître de l’ouvrage. Toutefois, il a été jugé que, dans le cas où l’obligation de conseil est renforcée (obligation de résultat), il appartient au fournisseur de prouver qu’il a bien rempli son obligation. Cela arrive dans la majorité des cas, notamment lorsque l’on est en présence d’un maître de l’ouvrage qui ne dispose d’aucune connaissance en matière de construction.
Cette obligation s’associe avec la liberté qu’a l’entrepreneur dans l’exécution de la prestation. C’est à l’entrepreneur de faire les choix nécessaires pour réaliser son travail et cette prérogative va de paire donc avec l’obligation de conseil.
Si le maître de l’ouvrage a imposé des délais à l’entrepreneur, le respect de ces délais est une obligation de résultat. Cela signifie qu’en cas de non respect des délais, l’entrepreneur subira des pénalités de retard. Cependant, l’entrepreneur pourra s’en exonérer s’il arrive à démontrer une cause étrangère, indépendante de sa volonté et qui a entrainé le retard du chantier (exemple : des intempéries).
En plus d’exécuter le travail, l’entrepreneur doit exécuter « personnellement » le travail. Le contrat d’entreprise est un contrat conclu intuitu personae, c’est à dire en fonction de la personne de l’entrepreneur.
Cependant, un obstacle peut s’opposer à ce que ce soit l’entrepreneur qui exécute lui même le travail : il peut y avoir un poste de travail dans lequel l’entrepreneur n’a pas les qualifications requises. Pourtant, le travail doit être exécuté. Dans ce cas, l’entreprise va devoir sous-traiter ce travail à une autre entreprise qui dispose des qualifications nécessaires. Pour ce faire, il va devoir faire agréer par le maître de l’ouvrage, l’entreprise sous-traitante qui interviendra sur le chantier (pour plus de précision sur le régime de la sous-traitance, voir la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance).
Enfin, concernant la responsabilité de l’ouvrage pendant les travaux, il faut faire une distinction :
– si l’entrepreneur fournit les matériaux et le travail, si la chose vient à périr, la perte est à la charge de l’entrepreneur car le transfert de propriété qui se fait au moment de la réception des travaux n’a pas encore eu lieu. En revanche, si la réception n’a pas encore eu lieu, mais que le maître de l’ouvrage a été mis en demeure de réceptionner les travaux, la perte de la chose pèsera alors sur le maître de l’ouvrage.
– si l’entrepreneur ne fournit que son travail, la chose est donc fournie par le maître de l’ouvrage. La chose étant la propriété du maître de l’ouvrage, c’est lui qui subira sa perte si la chose venait à périr, sauf faute de l’entrepreneur. Donc, en cas de perte de la chose sans faute de l’entrepreneur, ce dernier aura tout de même droit à sa rémunération.
b. Les obligations du maître de l’ouvrage
Le maître de l’ouvrage doit tout d’abord rémunérer l’entrepreneur pour la prestation qu’il a accompli.
Le prix n’a pas besoin d’être déterminé dans le contrat d’entreprise. De plus, il existe différentes manières de calculer le prix dans un contrat d’entreprise. Par exemple, le prix peut être fixé par rapport au nombre d’heures travaillées. On dit alors que le prix est calculé au métré. Le prix peut également dépendre d’un marché sur devis ou d’un marché à forfait (encore appelé à prix fait).
Concernant le moment où le prix doit être payé, en général, ce problème est réglé par le contrat. Le paiement peut être échelonné dans le temps, en fonction de l’avancement des travaux. Le paiement peut aussi être immédiat. Dans ce cas, le maître de l’ouvrage peut faire une retenue de garantie de maximum 5% sur le prix dû à l’entrepreneur (Loi du 16 juillet 1971). Cette retenue de garantie devra être consignée sur un compte. Son objet est de garantir l’exécution conforme des travaux commandés à l’entrepreneur.
La retenue de garantie peut être consignée pendant un an. Au bout de cette période, si l’entreprise a effectué correctement son travail, la retenue de garantie lui sera versée. Dans le cas contraire, le maître de l’ouvrage peut s’opposer à la libération de la retenue de garantie.
Le maître de l’ouvrage a également l’obligation de réceptionner les travaux quand ceux-ci sont terminés (article 1792-6 du Code civil).
La réception est définie par le Code civil comme l’acte juridique par lequel le maitre de l’ouvrage accepte l’ouvrage avec ou sans réserves. C’est donc un acte juridique unilatéral qui met fin au contrat d’entreprise. A la réception, les risques de l’ouvrage vont donc être transférés de l’entrepreneur au maître de l’ouvrage.
Le maître de l’ouvrage peut réceptionner l’ouvrage avec ou sans réserves. Les réserves font référence ici aux défauts, critiques que peut émettre le maître de l’ouvrage. L’ouvrage n’est pas conforme à ce que demandait le maître de l’ouvrage. L’entrepreneur a une période d’un an pour lever les réserves. Tant que des réserves sont émises, la réception ne pourra pas s’effectuer.
Il existe trois formes de réception :
– la réception amiable : le maître de l’ouvrage réceptionne seul en présence des entreprises et sans assistance ;
– la réception judiciaire : il s’agit du cas où l’une des parties refuse de réceptionner. L’autre partie va donc saisir le juge des référés aux fins qu’il désigne un expert dont la mission va être de décrire les travaux, d’indiquer les mal façons. Le rapport de l’expert vaudra procès verbal de réception ;
– lorsqu’il n’y a pas de réception : à la fin des années 80, la Cour de cassation a admis l’existence d’une réception tacite, mais cette réception doit correspondre à la volonté du maitre de l’ouvrage et elle doit être contradictoire. Pour la Cour de Cassation, le simple fait de prendre possession de la chose ne constitue pas une réception, il faut des éléments supplémentaires. Par exemple, constituera une réception tacite, le fait pour le maitre de l’ouvrage d’avoir payé le prix, d’avoir formé l’une ou l’autre critique … Il faut trouver des manifestations dans le comportement du maître de l’ouvrage prouvant qu’il a accepté l’ouvrage et ces signes doivent s’être manifestés aussi envers l’entrepreneur.
La réception entraine également différents effets. Tout d’abord, la réception met fin au contrat d’entreprise. Mais elle est aussi le point de départ de différentes garanties dues par les entrepreneurs (garantie de parfait achèvement, garantie biennale, garantie décennale).
Auteur : Audrey LOTZ