La garantie des vices apparents
L’article 1642-1 du Code civil dispose « Le vendeur d’un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l’expiration d’un délai d’un mois après la prise de possession par l’acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents. Il n’y aura pas lieu à résolution du contrat ou à diminution du prix si le vendeur s’oblige à réparer. »
Le vice apparent est une anomalie, une défectuosité, apparente, c’est à dire que l’acheteur normalement prudent mais dépourvu de compétences techniques particulières peut déceler après des vérifications sommaires (Cass, 3è civ, 03 mai 1989). Il n’est pas exigé qu’il compromette la solidité de l’ouvrage ou le rende impropre à sa destination (contrairement au vice caché, Cass, 3è civ, 28 avril 1996).
Le vice est apparent lorsqu’il est décelé, conformément à l’article 1642-1 du Code civil, soit avant la réception des travaux, soit avant l’expiration d’un délai d’un mois après la prise de possession par l’acquéreur.
L’action doit, à peine de forclusion (c’est à dire que l’action sera éteinte, que vous ne pourrez plus l’exercer), être introduite dans l’année suivant la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformité apparents (réception des travaux ou 1 mois après la prise de possession par l’acquéreur.
Deux types d’actions peuvent être introduites par l’acquéreur
-l’action rédhibitoire: elle lui permet d’obtenir la résolution de la vente
-l’action estimatoire: elle lui permet d’obtenir une diminution du prix
Toutefois, l’article 1642-1 du Code civil écarte ces deux actions dans l’hypothèse où le vendeur s’engage à réparer.
La garantie contre les défauts d’isolation phonique:
Un régime particulier s’applique en matière de défaut d’isolation phonique organisé par l’article L 111-11 du Code de la construction et de l’habitation. Ce texte prévoit que le vendeur ou le promoteur immobilier est garant, à l’égard du premier occupant de chaque logement, de la conformité (aux exigences minimales requises en matière d’isolation phonique) pendant un an à compter de sa prise de possession.
La garantie des vices cachés:
L’article 1646-1 du Code civil prévoit que le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maitre de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792 et suivants de ce même code.
Toute clause limitative ou élusive de garantie est prohibée par l’article L 261-16 du Code de la construction et de l’habitation.
La garantie du par le vendeur est donc la même que celle due par les entrepreneurs et autres constructeurs: il s’agit des garanties biennale et décennale, mais pas de la garantie de parfait achèvement.
La garantie décennale:
Elle est issue de l’article 1792 du Code Civil qui dispose « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage (par exemple: infiltrations, risque d’incendie du fait des malfaçons affectant l’installation électrique,… mais il n’est pas nécessaire que l’immeuble soit menacé de ruine et il suffit que le dommage risque de se produire dans un avenir proche, Cass, 3è civ, 24 novembre 1987) ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination (désordres fonctionnels ou structurels rendant l’immeuble inhabitable: défaut d’étanchéité, fissurations intérieures et extérieures graves, fléchissement d’un parquet. Le dommage peut également affecter les éléments d’équipements de l’immeuble: installation de chauffage insuffisante, nuisances sonores intolérables provenant d’une chaufferie Cass civ 3è 12 juin 1991…)
Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère. »
L’article 1792-2 ajoute que cette présomption de responsabilité s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert. Un élément d’équipement forme indissociablement corps avec un ouvrage lorsque sa dépose, son montage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage. Il s’agira par exemple d’un dallage scellé au sol, de carrelage recouvrant la façade de l’immeuble…mais pas d’un plafond suspendu (Cass, 3è civ, 07 décembre 1988), ni d’une gaine d’air chaud posée sur des charpentes elles mêmes fixées au bâtiment (Cass, 3è civ, 24 mai 1989)
L’application de la garantie dépend donc aujourd’hui de la gravité du vice compte tenu de l’utilisation de l’immeuble.
L’article 2270-2 du Code civil prévoit que la durée de cette garantie est de 10 ans à compter de la réception des travaux: l’action doit être intentée dans ce délai.
Le vendeur peut s’exonérer de sa garantie en démontrant que les dommages proviennent d’une cause étrangère.
La garantie biennale:
Elle est régie par l’article 1792-3 du Code civil qui dispose « les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de sa réception ».
Il s’agit d’une forme de garantie résiduelle dans la mesure où elle ne concerne que les éléments d’équipement dissociables de l’immeuble. Il s’agira, par exemple, d’une climatisation (Cass, 3è civ, 12 mai 1982), d’un chauffe-eau mural, un plafond suspendu, une gaine d’air chaud,…
Il convient de préciser qu’il semblerait que la jurisprudence ait étendu la garantie biennale aux éléments d’équipements ayant été installés plus de 2 ans après la réception des travaux en remplacement des équipements d’origine (Cass, 3è civ, 11 mars 1992).
Pour la garantie biennale comme pour la garantie décennale, sont tenus à garantie à l’égard de l’acquéreur le vendeur d’immeuble à construire ainsi que tous les locateurs d’ouvrage de telle sorte que l’acquéreur peut choisir d’agir contre le vendeurs ou tout autre intervenant à la construction et assimilé à un constructeur.
Toutefois, si le vendeur s’est immiscé dans la construction de façon notoire, les locateurs d’ouvrage sont exonérés de leur responsabilité (Cass, 3è civ, 11 décembre 1991).
Bénéficient de la garantie l’acquéreur mais également tous les propriétaires successifs de l’immeuble (qui ne pourront alors agir que contre le vendeur de l’immeuble à construire).
Les délais dans lesquels l’action doit être intentée (2 ans pour la garantie biennale et 10 ans pour la garantie décennale) ont pour point de départ la réception des travaux qui peut être prouvée par tout moyen.
L’acquéreur peut, à son choix, exercer 2 types d’actions:
-l’action rédhibitoire par laquelle il obtiendra la résolution de la vente
-l’action estimatoire par laquelle il obtiendra une diminution du prix sauf si le vendeur s’engage à réparer. En tous les cas, le vendeur pourra être condamné à verser à l’acquéreur des dommages et intérêts pour troubles de la jouissance.
Auteur : Gabriel Seignalet